Élections: les jeunes ont aussi des choses à exprimer!

Jeudi 18 janvier 2024

Timothé Fillon, secteur communication Ligue de l'Enseignement

Pour la première fois de leur vie et de l’histoire de la Belgique, plus de 260.000 jeunes de 16 et 17 ans auront bientôt l'occasion de voter aux élections européennes. Une question reste en suspens d’ici là: combien d'entre eux franchiront le pas des urnes? Nous avons rencontré Nellie, une adolescente de 17 ans qui termine ses secondaires dans une école à pédagogie active et qui n’a pas attendu l’ouverture du scrutin pour se mêler de politique.

Éduquer: Que pensez-vous de l’élargissement du droit de vote?

Nellie: Je trouve cette mesure très enthousiasmante. Je suis convaincue de l’importance de cette décision car les jeunes ont également des choses à exprimer. Bien que les opinions des parents exercent une large influence dans ce choix, proposer aux jeunes de voter les oblige à se poser des questions et à se renseigner sur le sujet. Cet élargissement permet d’engager des discussions politiques à table, autant avec les parents qu’avec les amis et les amies. Cette première expérience va nous forcer à nous questionner sur les valeurs qui nous animent.

Éduquer : Les jeunes sont-ils assez matures pour voter dès l’âge de 16 ans?
N.:
Oui, évidemment! Comme le vote n’est pas obligatoire avant la majorité, les jeunes qui s’intéressent à la politique iront voter, tandis que ceux qui sont moins sensibilisés resteront chez eux.

Éduquer: Que représente la politique pour vous?
N.:
La politique est omniprésente dans la vie quotidienne. C’est une discipline qui m’intéresse beaucoup et j’ai d’ailleurs choisi de m’orienter en option Sciences sociales. Je milite dans le mouvement politique Extinction Rebellion, un groupe qui lutte contre la crise climatique en pratiquant la désobéissance civile. Nous avons par exemple organisé des actions contre TotalEnergies et Engie. J’ai commencé en participant à quelques réunions et j’ai très rapidement accroché avec l’ambiance générale. Je suis dans le milieu écologiste depuis toute jeune, la sensibilisation de mes parents à ces enjeux contribue largement à ma politisation.

Éduquer: Comment vous informez-vous?
N.:
A l’école, nous abordons souvent les questions d’actualité. Les enseignant·es dégagent des plages horaires pour en parler: les «Quoi de neuf?». Ce sont des activités brèves, organisées le matin dans certaines matières (géographie, histoire et sciences sociales) au cours desquelles les élèves ont la possibilité d'introduire un sujet qui les préoccupent et dont ils souhaitent discuter. Je m’informe également via les réseaux sociaux, où je suis abonnée à différents canaux d’actualité. J’essaie de parcourir l’ensemble pour avoir une vision globale et j’approfondis les sujets qui m’intéressent. Même si les questions politiques sont des sujets très complexes, je considère qu’il est important de construire une réflexion sur ce qui se passe dans le monde.

Éduquer: Ressentez-vous une forme de désintérêt pour la politique chez les jeunes?
N.:
Mon avis n’est pas objectif car j’évolue dans un milieu social où une grande partie de mes proches s’y intéresse. Nous discutons souvent de politique entre copines. Bien sûr, cela varie selon le cercle d’amies: certaines manifestent peu d’intérêt tandis que d’autres sont très revendicatrices. Nous militons ensemble. C’est agréable de mutualiser nos informations, d’assembler nos colères et de les comprendre dans le partage. Bien entendu, la politique ne monopolise pas toutes nos conversations, nous savons aussi faire la fête! Le désintérêt des jeunes est peut-être lié à la difficulté qu'ils éprouvent à se reconnaître dans les discours des politiciens.

Éduquer: Comment revitaliser la politique auprès de la jeunesse?
N.:
Pour susciter l'intérêt des jeunes, une approche consisterait à les atteindre sur leur terrain en créant des contenus vidéo courts et percutants, adaptés aux réseaux sociaux, pour aborder des sujets complexes de manière accessible. Cette méthode ne devrait en aucun cas être le seul moyen d'informer les jeunes. Il est important que la politique vienne dans les écoles, pour toucher directement l’ensemble des futurs votants et votantes.
Cet élargissement est une occasion pour apprendre à se renseigner sur le vote. Néanmoins, il n’y a pas assez de visibilité médiatique sur cette ouverture aux 16 et 17 ans. J’ai dû entamer des fouilles sur internet pour trouver des informations. Nous en avons parlé en classe parce que nous abordons les sujets politiques à l’école, mais le questionnement politique n’est pas une pratique innée. Il y a certainement des personnes qui n’y connaissent pas grand-chose et qui ont envie de voter mais qui ne sont pas assez outillées, dont les parents ne parlent jamais de politique. Et si les gens ne s’intéressent pas à la politique, ce n’est pas parce qu’elle est ennuyeuse mais parce qu’ils ne la comprennent pas.
Enfin, je pense que l’inclusion est très importante. Pour élargir la participation, l'organisation d’échanges entre des élèves et des élu·es politiques pourrait directement intégrer l'opinion des jeunes, les motivant ainsi à s'impliquer davantage dans le débat public.

«Ce qui m’intéresse le plus dans un programme politique, c’est son approche de l’écologie.»

Éduquer: Quelles sont vos préoccupations politiques?
N.:
Mon principal combat, c’est la crise climatique. C’est ce qui me motive à agir: aller aux manifestations, participer à des actions et bientôt aller voter. Ce qui m’intéresse le plus dans un programme politique, c’est son approche de l’écologie. Mais comme les combats et les luttes se mélangent, je m’intéresse également à d’autres problématiques comme les questions de genre, les questions sociales, la décolonisation, etc.

 

fév 2024

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Photo de Bárbara Fróes sur Unsplash

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